La vraie vie
Retrouver le calme et l’espace de la méditation : laisser les choses prendre leur place, attendre qu’elles se manifestent ou contempler les espaces entre les manifestations. Pas de hâte, de stress, d’agitation, d’anxiété : le flot naturel de la vie. Le recul, la distance, la perspective sur les événements. Prendre le temps – prendre du temps – pour soi, pour les autres ; le temps d’être, sans attente, à l’écart du faire et de l’avoir. Écouter, voir, sentir, la nature, le silence, l’ineffable, le subtil. Ralentir le rythme, pour trouver la précision et la puissance, comme au golf. Rien n’est vraiment urgent, important, indispensable… Les choses se manifestent d’elles-mêmes, quand elles sont nécessaires, sans notre intervention. Nous nous trouvons naturellement là où l’on a besoin de nous, et sommes prêts à donner spontanément notre aide, sans les contraintes de la préméditation.
Ressentir notre appartenance, notre interrelation au tout et agir en fonction de ses demandes, de ses pulsions, plutôt que de nos exigences, nos aspirations. Le temps s’écoule à son rythme, ou peut-être à notre rythme, à la cadence que nous lui imposons, celle de l’éternel présent. Renoncer à suivre les appels du passé et du futur, et à s’attacher à leur réalité illusoire. Vivre l’expérience de chaque instant pleinement, complètement, passionnément. Voir la beauté, l’harmonie, l’amour dans chaque chose, dans chaque être, dans chaque rencontre, et les laisser s’exprimer, se développer, se réveiller, dans l’espace de la fusion et de la synchronicité. Laisser la poésie remplacer le discours mental, laisser parler le cœur, exprimer ses sensations et ses émotions ; laisser briller la lumière de l’être profond, de notre manifestation divine ; elle est en harmonie avec le tout et avec toutes ses parties, elle ne connaît pas les conflits décidés par l’avidité et le rejet, mais communique et participe à l’évolution globale.
Les motivations ne surgissent plus de l’ignorance égoïste, mais de la sagesse et de la compréhension d’une dimension supérieure à la conscience ordinaire ; d’une lumière qui dépasse le sensoriel, mais éclaire l’âme et cette réalité qui n’est pas celle du monde matériel où elle s’est incarnée, mais celle dont elle émane et où elle aspire à retourner, enrichie par ses expériences terrestres, même si elles sont souvent douloureuses. Ne perdons pas le contact avec la vibration divine, mais retrouvons-la quand elle nous échappe dans cet espace qui sépare nos pensées et nos actions et ponctue la vraie vie de notre être essentiel.
14 mai 1999, Chiang Mai